Projet Susie : L’Europe enfin indépendante dans le vol spatial habité ?

Après l’abandon du projet Hermes en 1992, l’Europe n’a jamais su rebondir sur la question de l’indépendance des vols habités. Pourtant, la plupart des technologies sont désormais maîtrisées par l’Agence Spatiale Européenne (ESA). Développé depuis 3 ans au sein d’ArianeGroup, le projet Susie vient d’être présenté ce 18 septembre lors du Congrès international d’astronautique (IAC). Celui-ci se tient à Paris du 18 au 22 septembre. Susie est un projet de vaisseau spatial européen pouvant être embarqué au sommet d’un lanceur Ariane 6. Il pourrait transporter du fret mais aussi des passagers en orbite, voire en direction de la Lune ou de Mars.

Le vol habité, une priorité secondaire en Europe

Projet (version de 1992) de navette spatiale Hermes, attachée à la station Colombus © ArianeGroup / Airbus

Entre 1975 et 1992, l’Agence Spatiale Européenne a développé un véhicule spatial habité : Hermes. Le véhicule avait d’abord été conçu avec une apparence proche d’une navette spatiale américaine, Shuttle, en plus petit. Elle s’en éloigna au fur et à mesure de sa conception. Hermes finit par ressembler plus au principe du X-20 Dyna Soar de Boeing. Il devait transporter 3 passagers en orbite grâce aux lanceurs Ariane 4 puis Ariane 5. Hermes devait permettre d’envoyer des équipages à bord d’une station spatiale européenne, Colombus.

Or, lors de l’internationalisation du projet de station spatiale américaine Alpha, devenant ISS (Station Spatiale Internationale), le projet de station spatiale européenne Colombus fut transformé en une série de modules embarqués sur l’ISS. Le projet d’avion spatial Hermes perdait en intérêts puisque l’ISS allait être visitée régulièrement par la navette spatiale américaine. La NASA proposait donc à l’Europe d’utiliser son Shuttle pour embarquer les astronautes européens à bords de la station spatiale. L’Europe a choisi d’annuler le projet Hermes en 1992.

Des technologies pourtant présentes

Depuis, l’Europe a quand même appris à maîtriser les technologies pour développer un vaisseau spatial habité réutilisable. C’est le cas à travers les 5 vaisseau cargos ATV que l’Europe a envoyé pour transporter jusqu’à 7,7 tonnes de fret à bord de l’ISS. Cette quantité reste un record en dehors des 16 tonnes offerts par la navette spatiale américaine. Ils ont officiés de 2008 à 2014. Entre 2005 et 2008, l’ATV a inspiré l’ESA pour développer une version habitée, le CSTS (Crew Space Transportation System), conjointement avec l’agence spatiale russe. Il aurait pu remplacer le vieillissant vaisseau Soyouz pour les deux agences à la fois. C’est l’ESA qui pris la décision d’arrêter ce projet. Les russes ont fini par développer leur propre vaisseau, le PPTS. Ce dernier est devenu aujourd’hui le projet Oriol (Aigle) qui devrait voler pour la première fois en 2023.

Nous pouvons citer le module de service du nouveau vaisseau spatial américain Orion, du programme Artemis, est développé en Europe. Il y a également la petite navette spatiale réutilisable, non habitée, Space Rider, qui devrait faire son premier vol en 2023. Enfin, les projets Themis et Callisto sont des études de prototypes de lanceurs réutilisables pouvant atterrir à la verticale.

Susie relance l’espoir du vol habité européen

Vision d’artiste d’un vol de SUSIE. © ArianeGroup

Finalement longtemps boudé par l’Europe, la création d’un véhicule spatial habité 100% européen pourrait peut-être devenir une nouvelle ambition. Le vaisseau Susie (Smart Upper Stage for Innovative Exploration) serait en réalité un vaisseau pensé pour être à la fois un cargo automatique (7 tonnes de cargaison dans une baie de 40 m3) et un vaisseau habité pouvant transporter jusqu’à 5 passagers.

Compatible avec le lanceur Ariane 6, Susie est assez modulaire pour être adapté à de nouveaux lanceurs. C’est ainsi que Susie pourrait également être utilisé sur les futurs Ariane Next et Ariane 7. Entièrement réutilisable, Susie pourrait revenir se poser sur Terre à la manière du Starship de SpaceX. L’engin se laisserait freiner sur son flanc, puis se retournerait à la verticale pour faire fonctionner ses rétrofusées et atterrir en douceur.

C’est au mois de novembre prochain que les 22 états membres de l’ESA, lors d’une conférence ministérielle, vont devoir trancher sur le bien fondé d’un tel projet. Si celui-ci est adopté, Susie pourrait voler à l’entrée de la prochaine décennie.

Arrimage d’un vaisseau SUSIE à une station spatiale. © ArianeGroup
Partagez cet article
Panier
Retour en haut