Un nouvel appareil haptique, développé par l’Université de Stanford, communique les émotions perçues au toucher avec près de 80 % de précision. Son objectif : simuler à distance les émotions véhiculées et ressenties par le contact humain.
Percevoir les intentions par le toucher
À l’USC Viterbi School of Engineering, la roboticienne Heather Culbertson explore diverses méthodes pour simuler le toucher. Dans le cadre d’une nouvelle étude, dont elle est l’auteur principal en collaboration avec des chercheurs de Stanford, la roboticienne a voulu déterminer si une paire de proches (amis ou amants) étaient capables de communiquer et d’exprimer les mêmes émotions à distance. D’ordinaire, les individus perçoivent en effet les véritables intentions d’un partenaire par contact environ 57 % du temps. Les participants à l’étude devaient ainsi interagir via un appareil simulant le toucher humain. Les candidats étaient alors capables de discerner l’intention voulue environ 45 % du temps. Ainsi, les appareils de cette étude communiqueraient les émotions propres au toucher avec une précision proche des 80 % de celles du contact humain.
Si notre sens du toucher est unique, les individus sont cependant dotés ont d’un “langage tactile”, explique Culbertson, professeur adjoint à WiSE Gabilan et professeur de génie aérospatial et mécanique à l’USC. Créer un contact virtuel simulant celui que nous avons avec nos proches se révèle donc particulièrement complexe. Non seulement chaque personne diffère dans sa capacité à interpréter les contacts, mais nous pouvons également avoir une manière distincte de communiquer différentes émotions. Le défi pour les chercheurs était de créer un algorithme suffisamment flexible pour intégrer les nombreuses dimensions du toucher.
Une bibliothèque des sensations du toucher
L’étude, qui apparaît en pré-impression dans IEEE Transactions on Haptics, a été réalisée en deux phases. Tout d’abord, une base de données a été créé sur les interactions des individus par le biais du toucher. La méthode étant d’enregistrer l’emplacement et la pression des contacts pendant que les participants communiquaient différentes émotions à leurs partenaires. Une fois cet ensemble de données créé, les chercheurs ont ensuite classé ces gestes selon l’expression communiquée. L’attention, la gratitude, le bonheur, la tristesse ou l’amour étant classifiés afin de créer une bibliothèque de signaux préenregistrés.
Ces signaux ont ensuite été traduits en pixels tactiles (taxels) capables de communiquer des émotions à un deuxième groupe de participants. Ces émotions étant conduites via un brassard haptique portable, comportant des actionneurs à bobine avec huit points de contact. Au total, 661 gestes tactiles ont été enregistrés. Environ 45 pour cent du temps, les personnes portant le brassard se montraient capables de comprendre l’émotion voulue via le toucher à distance (contre seulement 57 pour cent du temps en contact direct). L’étude prouve ainsi que la signification et les expressions sociales véhiculées par le toucher peuvent se communiquer à distance.
Un outil créateur de lien durant la pandémie
La prochaine étape, concèdent les chercheurs, sera de personnaliser les algorithmes. Il s’agit en effet de générer un sens du toucher virtuel plus raffiné pour une précision améliorée.
Selon le Professeur Culbertson, “nos communautés se font toujours plus mondiales. Aussi, la division physique générée par la pandémie s’accentue à mesure que nos proches restent dispersés à travers le monde. De tels outils permettraient aux individus d’atteindre et de toucher leurs proches indépendamment de la séparation physique. Ils contribueraient ainsi à réduire notre isolement.”
(c) Nasa