Une équipe de l’Université Purdue, aux USA, a su produire une puce informatique capable de se recâbler dynamiquement à la manière du cerveau humain, selon une étude publiée début février dans la revue Science. Ils entendent ainsi améliorer les capacités de l’IA à apprendre au fil du temps.
Puce informatique contre cerveau : rigidité contre plasticité
A présent que l’IA s’est vue reconnaitre la qualité d’inventeur, pourra-t-elle bientôt apprendre à la manière de l’homme ? “Le cerveau des êtres vivants peut apprendre en continu tout au long de leur vie” indique ainsi Shriram Ramanathan, professeur à l’école d’ingénierie des matériaux de l’Université Purdue et coordinateur de l’étude. “Nous avons maintenant créé une plate-forme artificielle permettant aux machines de faire de même”.
Selon l’étude, si le cerveau humain s’adapte pour apprendre, l’IA a tendance à substituer une information à une autre. De telle sorte qu’elle “oublie” ce qu’elle a appris précédemment. Le cerveau, lui, est élastique : il forme des connexions entre les neurones toute au long de la vie, en vue de leur permettre d’intégrer de nouvelles informations. En revanche, les circuits d’une puce informatique ne changent pas.
Qu’il s’agisse des véhicules autonomes ou des robots envoyés dans l’espace, cette rigidité devient problématique aussitôt que l’IA doit évoluer et prendre des décisions par elle-même dans des environnements isolés.
Demain, des ordinateurs inspirés du cerveau humain
L’équipe a donc conçu un matériel programmable à la demande via des impulsions électriques. “Nous voulons construire un ordinateur ou une machine qui s’inspire du cerveau”, indique ainsi Shriram Ramanathan. “En conséquence, nous voulons avoir la capacité de programmer, reprogrammer et changer la puce en continu”.
Leur dispositif : un petit appareil rectangulaire constitué de pérovskite, un matériau particulièrement sensible à l’hydrogène. Des impulsions électriques réglées à différentes tensions permettent à l’appareil de mélanger une concentration d’ions hydrogène en quelques nanosecondes. L’activité qui en résulte est similaire à ce que les chercheurs ont pu cartographier dans les différentes zones du cerveau.
Lorsque l’appareil accumule l’hydrogène en son centre, il produit une activité semblable aux neurones. Inversement, s’il vient à manquer d’hydrogène à cet endroit, l’appareil sert de synapse – une connexion entre les neurones. Ce sont les synapses que le cerveau utilise pour stocker la mémoire dans ses circuits neuronaux complexes.
Un dispositif adapté à l’échelle industrielle
Selon leurs différentes simulations, la physique interne de cet appareil est capable de créer une structure dynamique. Son réseau de neurones artificiels serait ainsi plus efficient qu’un système fonctionnant à l’électricité statique. Ce réseau de neurones utilise le “reservoir computing”, qui explique comment différentes parties d’un cerveau communiquent et transfèrent des informations.
Selon l’équipe, cette technique pourrait être adoptée facilement par l’industrie. En effet, le dispositif utilise des techniques de fabrication standards, compatibles avec les semi-conducteurs, et fonctionne à température ambiante.
Les chercheurs s’efforcent d’appliquer ces concepts sur des puces à grande échelle, afin de construire un ordinateur inspiré du cerveau. La recherche a été soutenue par le Bureau des sciences du Département américain de l’énergie et la National Science Foundation.
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